• Lettre ouverte au ministre

    Monsieur le Ministre de l’Éducation nationale,

     Comme vous le savez, la part des CCF pour la session 2013 représente près de 90 % de l’évaluation des diplômes de l’enseignement professionnel ; quasiment toutes les disciplines et toutes les formations sont concernées.

    Pour le SNUEP-FSU, cette généralisation des CCF compromet le principe d’égalité entre les élèves.

    En effet, la mise en œuvre varie selon les diplômes, les filières de formation, les disciplines, les académies, et les établissements… La gestion des CCF et l’augmentation des PFMP diminuent de plus d’un quart la durée de la formation. Cela appauvrit les temps disciplinaires pourtant dus aux élèves, empêche l’approfondissement de certaines notions réputées plus complexes ou encore rend quasiment impossible de consacrer du temps supplémentaire aux élèves les plus en difficultés. De surcroît, les CCF, devant tous être finalisés pour la fin du mois de mai, participent à l’accroissement de l’absentéisme ; les élèves ne voyant plus la nécessité de poursuivre leurs cours au-delà de la date de l’épreuve. De plus, les textes de cadrage des CCF indiquent que les élèves ne peuvent être interrogés que sur ce qui a été vu en cours, cela légitimerait le fait que l’ensemble du référentiel diplôme n’ait pas à être traité, la réduction d’un an de la formation le rendant d’ailleurs impossible.

                                    

    Les enseignant-es des lycées professionnels ont largement exprimé leurs sentiments quant aux dégradations des conditions de travail liées à la préparation, à la gestion et à l’organisation de ces CCF. Ils dénoncent aussi l’impact négatif de ces modalités d’évaluation sur la qualité de la formation dispensée aux élèves. En effet, ces modalités polarisent sur l’ensemble du cycle de formation (CAP et Bac Pro) les pratiques des enseignant-es autour de l’évaluation certificative des lycéens professionnels ne laissant plus de place pour l’évaluation formative de ceux-ci. Le SNUEP-FSU avait réalisé l’an passé une enquête sur ce thème, dont nous vous avions exposé les résultats. Et cette année encore, les nombreux témoignages écrits reçus, que nous publierons prochainement sont inquiétants.

     

    De surcroît, dans le cadre de l’autonomie des établissements et de l’introduction du management entrepreneurial mené par les directions d’établissement, les conflits liés à l’organisation des CCF, et ceux relatifs à la remontée des notes, augmentent entre les enseignant-es et les chefs d’établissement. En effet, le manque de cadrage national des CCF et la volonté des équipes de directions et d’inspections d’obtenir des résultats positifs « à tout prix » aux examens engendrent des pressions inacceptables sur les collègues qui participent à la souffrance au travail dénoncée dans de nombreuses études.

     

    Nous réaffirmons que la généralisation des CCF fait peser de graves menaces d’une part sur les pratiques professionnelles et les contenus enseignés et d’autre part sur la valeur et la reconnaissance des diplômes par les branches professionnelles. La réforme de la voie professionnelle, qui a mis en place des formations en 3 ans pour le Baccalauréat Professionnel et son corollaire - la généralisation des CCF, crée des diplômes « locaux » et participe à augmenter les inégalités entre élèves sur tout le territoire. Le caractère national et anonyme de ce diplôme, la qualité des enseignements et les contenus disciplinaires ont été sacrifiés au prétexte idéologique de masquer la réalité alarmante, pour les élèves comme pour les personnels, de cette réforme.

     

    Concernant l’épreuve de contrôle, le bilan effectué par les collègues est lui aussi navrant. Cette épreuve qui, à elle seule, propose une note équivalente à l’ensemble des épreuves du premier groupe est tout à fait inadaptée et irrationnelle. Ce mode de « calcul » aberrant est cependant explicite quant à l’objectif de la mise en place de cette épreuve : elle ne contribue qu’à augmenter artificiellement le taux de réussite aux baccalauréats professionnels. Nous nous interrogeons donc sur l’intérêt de maintenir cette épreuve dite de contrôle lorsque la quasi-totalité des candidat-es est désormais évaluée en CCF.

     

    Depuis plusieurs années maintenant, nous dénonçons la généralisation des CCF qui a enlevé tout caractère d’équité aux diplômes de la voie professionnelle et nous sollicitons des services compétents du ministère un réel bilan de ces dispositifs d’évaluation. Il semblerait qu’enfin nous ayons été entendus puisque vous annoncez la mise en place d’un groupe de travail sur ce thème à la rentrée prochaine et une modification des évaluations pour la rentrée 2014.

    Vous l’aurez compris, Monsieur le Ministre, le SNUEP-FSU revendique l’abandon de la généralisation des CCF au profit d’épreuves nationales terminales ponctuelles, seules garantes d’équité sur tout le territoire. Il souhaite voir se créer une épreuve de rattrapage digne de ce nom pour les diplômes de l’enseignement professionnel. Le SNUEP-FSU a l’ambition de croire que seul un enseignement professionnel initial de qualité avec des diplômes nationaux peut être porteur d’avenir pour les jeunes et pour la bonne santé économique de notre pays.

     

    Veuillez croire, Monsieur le Ministre, à notre profond attachement au service public d’Éducation et à la qualité de l’enseignement professionnel public et laïque.

     Le secrétariat national